Des centaines de manifestants qui se dirigeaient vers une prison pour femmes à Omdourman, au Soudan, ont été dispersés dimanche par des tirs de gaz lacrymogène, le pays étant en proie à un mouvement de contestation depuis près de deux mois.
« Nous sommes des battants, nous allons achever notre mission », a scandé la foule à Omdourman, ville voisine de la capitale Khartoum, appelant aussi à « renverser » le président Omar el-Béchir au pouvoir depuis 1989, ont indiqué des témoins.
A l’appel de l’Association des professionnels soudanais, fer de lance de la contestation, les protestataires se sont dirigés vers la prison pour femmes, exigeant la libération de manifestantes arrêtées.
Cette marche, intitulée « Rassemblement pour les femmes détenues », « nous encourage à continuer jusqu’à ce que nous obtenions gain de cause », a déclaré dimanche une manifestante à l’AFP.
« Les femmes sont à la tête du mouvement de contestation », a-t-elle ajouté, sous couvert d’anonymat.
Après avoir été dispersés par des tirs de gaz lacrymogène, les protestataires se sont réunis dans un autre quartier d’Omdourman, appelé « Rue 40 », selon des témoins.
« Nous sommes tous Ahmed », a alors entonné la foule, faisant référence à Ahmed al-Kheir, un enseignant de 36 ans ayant succombé à ses blessures lors de sa détention dans la ville de Khashm al-Girba (est), a rapporté un témoin.
La police antiémeute a de nouveau dispersé la manifestation en tirant des gaz lacrymogènes, ont indiqué des témoins.
Dans un secteur de Khartoum, un rassemblement a également été dispersé à coups de gaz lacrymogènes, selon des témoins.
Le Soudan est secoué par un mouvement de contestation déclenché le 19 décembre par la décision du gouvernement de tripler le prix du pain, dans un pays en plein marasme économique. Devenues quasi quotidiennes, les manifestations se sont transformées en mouvement de protestation contre le président Béchir.
Selon un bilan officiel, 30 personnes sont mortes depuis le début du mouvement. Human Rights Watch (HRW) a fait état de 51 morts.
D’après des ONG de défense des droits humains, plus de 1.000 manifestants, leaders de l’opposition, militants et journalistes ont été arrêtés depuis le 19 décembre.
Le président Béchir a admis mercredi que des lois controversées sur l’ordre public avaient alimenté la colère des jeunes, « dont la majorité sont des femmes ».
Il a néanmoins toujours exclu de démissionner et imputé les violences lors des manifestations à des « conspirateurs ».