Plus de 130 personnes, jugées pour leur implication présumée dans une tentative de coup d’Etat que Malabo affirme avoir déjoué en décembre 2017, ont été condamnées par la justice équatoguinéenne à des peines d’emprisonnement allant de 3 à 96 ans.

Le détail des peines prononcées a été lu vendredi à la télévision d’Etat par Pascual Bacalé Nfono, le président du tribunal de Bata, la capitale économique du pays où se déroulait ce procès depuis le 22 mars.

Début janvier 2018, le régime équato-guinéen avait déclaré avoir déjoué un « coup d’Etat ».

Selon Malabo, un groupe de mercenaires étrangers avait voulu le 24 décembre 2017 attaquer le chef de l’Etat, Teodoro Obiang Nguema, qui se trouvait dans son palais de Koete Mongomo (à une cinquantaine de km du carrefour des trois frontières entre le Gabon, la Guinée et le Cameroun).

Le 27 décembre, une trentaine d’hommes armés avaient été arrêtés à la frontière entre le Cameroun et la Guinée équatoriale par la police camerounaise.

Les autorités équato-guinéenne avaient par la suite procédé à de nombreuses interpellations dans le pays.

Elles avaient également émis des mandats d’arrêt contre des Equato-guinéens installés hors du pays et des étrangers accusés d’être à l’origine de cette tentative de coup d’état.

Parmi les personnes condamnées, figurent des Equato-guinéens, mais aussi des Tchadiens, des Centrafricains, des Camerounais, ou encore cinq Français.

Plus de la moitié des accusés se trouvent à l’étranger, et ont été condamnés par contumace.

C’est le cas des cinq Français, parmi lesquels un ancien proche du régime, Dominique Calace de Ferluc, aujourd’hui proche de l’opposition et condamné à 59 ans de prison.

La plus lourde peine, 96 ans, a été prononcée à l’encontre de trois Equato-guinéens accusés d’être les cerveaux du coup d’Etat raté.

Il s’agit de l’opposant Bienvenido Ndong Ondo (alias Ricky), et de deux anciens magistrats Martin Obiang Ondo et Ruben Clemente Nguema Engonga.

Exilés en Espagne, ils sont à la tête d’un mouvement politique d’opposition, le Mouvement pour la libération de la Guinée équatoriale IIIe République (MLGE III R).

– « Mise en scène » –

D’autres Equato-guinéens opposants au régime de Malabo vivant en Europe ont été condamnés par contumace, comme Salomon Abeso Ndong en exil en Grande-Bretagne, condamné à 59 ans de prison.

La même peine a été prononcée à l’encontre de l’opposant historique, Severo Moto Nsa, actuellement en Espagne, et qui avait déjà été condamné par contumace à plus de 100 ans de prison, la justice l’accusant d’être à l’origine d’un coup d’Etat en 2004.

Présents au procès, l’ex-ambassadeur de Guinée équatoriale au Tchad, Enrique Nsue Anguesomo a écopé de 50 ans de prison et l’ex-directeur de la sécurité rapprochée du président Teodoro Obiang Nguema, Jualian Ondo Nkumu, de 21 ans de prison.

Le Tribunal a toutefois déclaré innocents 21 accusés et a décidé de leur libération immédiate.

Débuté le 22 mars, le procès du « Coup d’Etat » avait été suspendu début avril, avant de reprendre une semaine plus tard.

Deux magistrats et deux procureurs militaires, nommés par décret présidentiel, avaient alors rejoint les juges en place, tous civils.

Ces « peines (étaient) déjà décidées bien avant » le début du procès, a déploré l’un des avocats de la défense, Me Ponciano Mbomio Nvo. « Ce procès n’a été qu’une simple mise en scène », a -t-il ajouté.

La Guinée équatoriale a connu une histoire agitée de coups et tentatives de coups d’Etat depuis son indépendance de l’Espagne en 1968.

Le régime de Teodoro Obiang Nguema, 76 ans dont 39 au pouvoir, est régulièrement accusé d’atteintes aux droits de l’homme par ses opposants et des organisations internationales.