Pas de Croisette, ni de starlettes a priori pour le 73e festival de Cannes qui ne renonce pas pour autant à son édition 2020 en réfléchissant à de nouvelles « formes » pour exister, sur fond de crise sanitaire.

Le rendez-vous mondial du 7e art, qui s’est choisi cette année l’Américain Spike Lee pour président du jury, était resté silencieux depuis l’annonce lundi soir par le président français Emmanuel Macron que les grands festivals et événements ne pourront se tenir, « au moins jusqu’à mi-juillet », en raison du coronavirus.

« Il apparaît désormais difficile de penser que le Festival de Cannes puisse être organisé cette année sous sa forme initiale », ont admis ses organisateurs mardi après-midi.

« Néanmoins, nous avons commencé hier (lundi) soir de nombreuses consultations dans le milieu professionnel en France et à l’étranger. Elles s’accordent sur le fait que le Festival (…) doit continuer à étudier l’ensemble des éventualités permettant d’accompagner l’année cinéma en faisant exister les films de Cannes 2020 d’une manière ou d’une autre », ont-ils ajouté.

Programmé chaque année au mois de mai, le festival, couplé au Marché du film, attire 40.000 professionnels et environ 200.000 spectateurs. Il avait déjà refusé de capituler mi-mars, face à l’épidémie de coronavirus, envisageant dans un premier temps un report fin juin-début juillet.

« Les films réalisés dans l’optique d’aller à Cannes, car beaucoup se font et se calent sur le calendrier du festival, ont besoin d’une caisse de résonance », expliquait encore récemment à l’AFP Richard Patry, le président des exploitants de salles en France.

– Vitrine du 7e Art –

La tenue, « d’une façon ou d’une autre », du festival « serait une forme de coup de projecteur sur le redémarrage de la planète cinéma », soulignait alors ce membre du conseil d’administration cannois, alors que les salles de cinéma, en France comme aux Etats-Unis, sont portes closes.

De nombreux films, attendus au printemps, ont ainsi repoussé leur date de sortie comme le prochain James Bond et d’autres superproductions comme « Top Gun 2 », « Mulan » ou « Wonder Woman 1984 ».

Cannes est une vitrine essentielle pour les films français comme étrangers et une plateforme à récompenses.

Palme d’or 2019 et énorme succès au box-office, « Parasite » du Sud-Coréen Bong Joon Ho a ainsi remporté l’Oscar du meilleur film à Hollywood, une première pour un film en langue étrangère.

Le festival a déjà connu des éditions chahutées dont celle de 1968, interrompue après une fronde menée par des cinéastes, Godard et Truffaut en tête, en soutien au mouvement étudiant et ouvrier. Mais cette année, il va devoir aller plus loin et se réinventer. Mais sous quelle forme?

Alors que le festival d’animation d’Annecy prépare une édition numérique et va dévoiler mercredi sa sélection officielle, Cannes s’opposait encore il y a peu à cette stratégie.

« Pour Cannes, son âme, son histoire, son impact, c’est un modèle qui ne pourrait pas marcher », tranchait Thierry Frémaux, son délégué général, dans un récent entretien à Variety.

« Voir des films de Wes Anderson ou de Paul Verhoeven sur un ordinateur ? Découvrir +Top Gun 2+ ou le prochain Pixar, ailleurs que dans une salle? La sortie de ces films a été repoussée pour qu’ils puissent précisément être vus sur grand écran », selon le patron de la Croisette.

Un sentiment partagé par Alberto Barbera, à la tête de la Mostra de Venise, festival concurrent qui se tient chaque année à la rentrée. « Nous continuons à travailler exactement comme les années précédentes ».