L’opposante rwandaise Victoire Ingabire a annoncé samedi la création d’un nouveau parti, dans l’espoir d’obtenir l’agrément des autorités rwandaises pour mener ses activités politiques au Rwanda, pays dirigé d’une main de fer par le président Paul Kagame.
Mme Ingabire, libérée de prison en 2018 à la suite d’une grâce présidentielle, quitte le parti qu’elle a fondé en 2006 lorsqu’elle était en exil, les Forces démocratiques unifiées (FDU Ikingi). Ce dernier n’est pas reconnu par les autorités rwandaises, qui lui reprochent d’être « clivant » et de nier le génocide de 1994, et ne peut donc pas opérer officiellement au Rwanda.
« J’annonce le lancement d’un nouveau parti d’opposition », le Dalfa Umurunzi (Paix et Liberté pour Tous), a déclaré Mme Ingabire, qui accuse régulièrement le président et le gouvernement de bafouer la liberté d’expression, de réprimer l’opposition et de négliger les pauvres. « Cela m’aidera à continuer la mission qui m’a été assignée par le parti FDU Inkingi », notamment la quête de « l’unité des Rwandais ».
« L’espace politique est très réduit au Rwanda, mais nous sommes prêts à remplir toutes les demandes légales pour l’enregistrement et la conduite de nos activités en accord avec les lois de la nation », a-t-elle ajouté.
Ces dernières années, le FDU Inkingi a perdu plusieurs de ses membres à la suite de mystérieux décès et disparitions, qu’il considère comme des attaques contre les voix dissidentes au Rwanda.
En septembre, la formation politique avait annoncé qu’un de ses membres avait été assassiné à coups de couteau près de Kigali tandis qu’en mars, le porte-parole du FDU-Inkingi, Anselm Mutuyimana, avait été enlevé et son corps retrouvé dans une zone forestière de l’ouest.
Mme Ingabire a été libérée en septembre 2018 dans le cadre d’une grâce présidentielle accordée à plus de 2.000 prisonniers.
Elle avait été arrêtée en 2010 peu de temps après son retour au Rwanda alors qu’elle voulait se présenter à la présidentielle contre Paul Kagame comme candidate du FDU Inkingi, puis condamnée en 2013 à 15 ans de prison pour « conspiration contre les autorités par le terrorisme et la guerre » et « minimisation du génocide de 1994 » qui a fait 800.000 morts entre avril et juillet 1994, essentiellement parmi la minorité tutsi.
Kigali l’avait accusée d’avoir nié la réalité du génocide en demandant que les auteurs de crimes contre les Hutu soient eux aussi jugés.
Cette économiste hutu, qui n’était pas au Rwanda pendant le génocide, avait avant cela passé 17 ans en exil aux Pays-Bas.
Homme fort du Rwanda depuis 1994, M. Kagame est crédité du spectaculaire développement d’un pays exsangue au sortir du génocide. Mais il est aussi accusé de bafouer la liberté d’expression et de réprimer toute opposition.