Cinquante-huit personnes ont été tuées dans deux massacres cette semaine dans la province d’Ituri, dans le nord-est de la République démocratique du Congo (RDC), où une délégation de haut niveau est attendue vendredi sur les questions sécuritaires.

Au total, 23 personnes ont été tuées mardi puis 35 jeudi, en territoire d’Irumu dans le sud de cette province, a indiqué le ministre provincial de l’Intérieur, Adjio Gidi.

Le ministre a accusé le groupe armé d’origine ougandaise des Forces démocratiques alliées (ADF) d’être à l’origine de ces deux massacres qui ont provoqué « un mouvement important de population ».

Les auteurs « sont des ADF qui fuient la pression militaire du côté de la province du Nord-Kivu, précisément de Beni », a-t-il précisé.

L’armée congolaise affirme en effet mener depuis novembre dernier des « opérations d’envergure » contre les ADF dans la province du Nord-Kivu, voisine de l’Ituri. Ces miliciens, qui vivent en brousse, attaquent depuis les civils en Ituri face aux offensives de l’armée.

A l’origine des rebelles ougandais musulmans, les ADF ont tué 890 personnes depuis avril 2017, d’après les experts du Baromètre sécuritaire du Kivu (KST), qui ont commencé leur décompte à cette date.

Les ADF constituent de ce fait l’un des trois groupes armés les plus violents parmi ceux qui sont encore en activité dans l’Est de la RDC, soit plus d’une centaine, de même source.

« Nos éléments sont déjà sur les lieux » face à « l’ennemi », a affirmé le ministre de l’Intérieur de l’Ituri.

Les attaques ont eu lieu dans une région forestière appelée Tshabi.

« Les personnes ont été tuées par tous types d’armes, des armes blanches et des armes à feu », a déclaré à l’AFP un responsable de la communauté Nyali de Tshabi, Richard Balengilyao.

Cette même source fait état de 17 personnes disparues et sans doute enlevées. « La zone de Tshabi est une zone forestière, donc les recherches sont très difficiles. Actuellement l’armée congolaise aidée de la population est en train de chercher encore des victimes dans la forêt », a-t-elle ajouté.

Frontalière du Soudan du Sud et de l’Ouganda, riche en or, la province de l’Ituri est le théâtre d’autres massacres de civils dans sa partie nord, en territoire de Djugu, depuis décembre 2017.

A Djugu et ses environs, la milice Coopérative pour le développement du Congo (Codeco) est accusée d’avoir tué des centaines de civils, prétendant défendre l’une des communautés de l’Ituri, les Lendu.

 

– « Crimes contre l’humanité » –

 

Au total, plus d’un millier de civils ont été massacrés depuis décembre 2017 en Ituri, selon l’ONU. La plupart des victimes appartiennent à la communauté Hema.

La haute-commissaire aux droits de l’Homme des Nations unies Michelle Bachelet a dénoncé des « crimes contre l’humanité » après une visite en Ituri en janvier.

La Codeco s’est divisée depuis plusieurs mois en plusieurs groupes dont certains ont signé un « acte d’engagement unilatéral » pour rendre les armes.

Vendredi, des hommes armés identifiés comme des combattants Codeco, ont fait une descente sur le chef-lieu provincial Bunia, pour protester contre leur absence de prise en charge par les autorités, d’après des sources locales.

Un accord de paix a été signé en début d’année avec un autre groupe armé de la province, le FRPI, autrefois actif au sud en territoire d’Irumu.

Une délégation officielle de haut niveau doit arriver vendredi à Bunia chef-lieu de l’Ituri pour aborder les questions sécuritaires de la province.

Les ministre de l’Intérieur et de la Défense du gouvernement central sont annoncés, de même que le chef d’Etat-major de l’armée et le patron du renseignement intérieur, a indiqué une source du gouvernorat à des journalistes de l’AFP présents sur place.

D’anciens chefs de guerre ont été également envoyés en Ituri par le président Félix Tshisekedi pour une mission de paix.

La région avait été déchirée par un conflit communautaire entre Lendu et Hema entre 1999 et 2003, qui avait fait des dizaines de milliers de morts jusqu’à l’intervention d’une force de l’Union européenne (UE).