Une église a été incendiée dans la nuit de samedi à dimanche à Maradi (centre sud), troisième ville du Niger, par des manifestants qui protestaient contre l’arrestation d’un influent imam, libéré dimanche, a-t-on appris de sources concordantes.
« Depuis deux heures du matin, on est restés éveillés, l’église de Zaria (quartier populaire de Maradi) a été brûlée, la voiture du pasteur a été brûlée par des individus qu’on ne connaît pas. La gendarmerie est sur place, soyons prudents » a affirmé un responsable de l’église dans un message adressé à ses paroissiens.
Une source sécuritaire locale a « confirmé » l’incendie de cette église.
« Quelques manifestants ont brûlé des pneus ce dimanche matin » et « les Forces de sécurité (FDS) sont sur le terrain », a poursuivi cette source assurant que « le calme règne globalement dimanche à Maradi ».
Des témoins ont raconté que « samedi en fin soirée », des groupes de jeunes ont manifesté en posant des barricades sur la chaussée et en brûlant des vieux pneus.
Cheick Rayadoune, influent imam de la mosquée de Zaria, a été arrêté samedi par la police après avoir qualifié vendredi « d’anti-islam » un projet de loi du gouvernement sur « l’organisation de l’exercice du culte au Niger ».
Il a toutefois été « remis en liberté dimanche après-midi, il a reconnu son erreur et s’est excusé », a indiqué une source policière.
– « Tous mes partisans doivent cesser de brûler » –
« Tous mes partisans doivent cesser de brûler et de créer des troubles en ville, l’islam ne recommande pas cela, je n’ai aucunement été maltraité par la police », a déclaré Cheick Rayadoune dans un message peu avant sa libération. « J’ai été induit en erreur par ceux qui m’ont traduit (du français au haoussa) un texte supposé être le document officiel », a-t-il regretté et il « promet de rectifier » lors de « la prière hebdomadaire vendredi prochain ».
Le projet de loi a été adopté fin avril en conseil de ministres, qui soulignait alors une « absence totale de normes rigoureusement définies » concernant « l’exercice du culte » dans le pays, sur fond d’un « environnement sous-régional marqué par un développement de tendances religieuses fondamentalistes et extrémistes ».
Le texte doit encore être adopté par le Parlement.
Le texte de loi stipule notamment que « la liberté du culte doit s’exercer dans le respect de l’ordre public » et que « l’exercice du culte en lieu public (sera) soumis au régime de l’autorisation préalable ».
Il consacre « le droit de l’Etat de contrôler les sources de financement » pour « la construction et l’exploitation des lieux privés de cultes » qui seront « soumises à une autorisation préalable ».
« Cette loi est le fruit des plusieurs consultations et concertations profonde (…). Dans le texte il n’y a rien d’anti-islam », a commenté un haut responsable du ministère nigérien de l’Intérieur, pour qui il s’agit d’éviter que « les dérives prônées par les organisations obscurantistes terroristes » ne prennent de l’ampleur dans le pays.
En 2017, le ministère nigérien de l’Intérieur avait regroupé tous les oulémas nigériens pour un colloque pour travailler sur le sujet.
Le Niger est un pays très majoritairement musulman, avec 1 à 2% de chrétiens sur une population de plus de 20 millions d’habitants.
Il a déjà connu des troubles religieux graves. Après la publication de caricatures du prophète Mahomet par le journal français Charlie Hebdo en 2015, des émeutes antichrétiennes avaient fait dix morts à Niamey et détruit la plupart des églises de la capitale et de Zinder, la deuxième ville du pays.