Le Maroc a écrit samedi une page d’histoire en devenant le premier pays africain à atteindre les demi-finales d’un Mondial, où il affrontera le vainqueur du choc entre la France et l’Angleterre dans la soirée.

Le Maroc, qui a dominé le Portugal (1-0), rejoint donc la Croatie et l’Argentine, qualifiés vendredi pour le dernier carré. Et scelle peut-être la fin de carrière internationale, de Cristiano Ronaldo, un des plus grands footballeurs de l’histoire mais qui est en train de rater sa sortie.

La presse affiche la confrontation à sa Une, de Paris (« Choc royal », Le Parisien) à Marseille (« Une couronne à défendre », La Provence), et plus près du Channel: « Un France-Angleterre au rapport de force aussi excitant qu’indécis », résume La Voix du Nord.

De son côté, le Sun s’est offert des espaces publicitaires à Paris, pour promettre aux Français la chute de leurs champions du monde sortant.

« Il y aura du respect, mais ça va être la guerre », a prévenu l’ancien international anglais John Terry, prédisant « un long match, peut-être une partie d’échecs », en tout cas « un vrai test » entre voisins, à la riche histoire commune mais pour la première fois opposés dans un match à élimination directe.

« C’est une étape supplémentaire mais sans stress, sans retenue », a positivé Didier Deschamps, axant son discours sur « le plaisir », la « sérénité » et « l’excitation ».

Des duels, pas de favori

L’affiche regorge de duels XXL: l’attaquant supersonique Mbappé face au tonique Kyle Walker, Olivier Giroud au contact de Harry Maguire, la bataille des jeunes milieux Aurélien Tchouaméni et Jude Bellingham, et le face-à-face entre les capitaines Hugo Lloris et Harry Kane, amis depuis une décennie à Tottenham.

Le Daily Telegraph a tenté de chatouiller le gardien français, possible « talon d’Achille », mais le portier des Spurs a gardé son flegme et son sourire.

« On fait abstraction de tout cela, pas besoin d’une motivation extérieure pour jouer un quart », a commenté Lloris, qui s’accaparera le record de sélections avec une 143e cape, une de plus que Lilian Thuram.

Le match des tribunes sera lui à l’avantage des Anglais: 8.000 d’entre eux sont attendus, contre environ 4.000 Français parmi les 65.000 spectateurs espérés. Sur le terrain, difficile en revanche de prédire qui part favori.

Chaque camp dispose de latéraux offensifs, de milieux pouvant se projeter et de flèches qui peuvent piquer à tout moment sur les ailes.

Pour les Anglais, l’ennemi public N.1 s’appelle Mbappé, meilleur buteur du tournoi avec cinq réalisations en quatre matches, capable de fulgurances et d’accélérations dévastatrices.

« S’il y a bien quelqu’un qui puisse stopper Mbappé, c’est Kyle Walker », relève toutefois John Terry auprès de l’AFP.

Le joueur de Manchester City a déjà muselé l’attaquant du PSG en Ligue des champions, « il est sans doute le joueur le plus rapide en Premier League » et, « défensivement, il est très, très fort ».

La légende de Chelsea a cependant une « seule inquiétude, c’est que l’on focalise notre attention sur ce duel » en oubliant Olivier Giroud, Antoine Griezmann et les « autres forces » de l’armada tricolore.

L’Angleterre ne manque pas de munitions avec Phil Foden, Bukayo Saka et Harry Kane, son artificier en chef avec 52 buts au compteur, autant que Giroud, le recordman français, mais un de moins que l’Anglais Wayne Rooney.

« Un continent » avec le Maroc

Le vainqueur du « Crunch », surnom emprunté aux rugueux France-Angleterre en rugby, se rapprochera un peu plus de son rêve: un doublé historique pour les Bleus, inédit depuis le Brésil de Pelé en 1962, ou une deuxième étoile pour les Anglais, 56 ans après le Mondial-1966.

Vendredi, le suspense des premiers quarts s’est étiré jusqu’aux tirs au but.

L’Argentine de Messi est venue à bout des Pays-Bas (2-2 a.p., 4-3 t.a.b.) et la Croatie, finaliste en 2018, a créé la surprise en éliminant le Brésil de Neymar (0-0, 1-1 a.p., 4-2 t.a.b.).

Le Maroc, tombeur de l’Espagne en huitième de finale, n’a pas eu besoin des tirs au but, ni même de la prolongation, contre le Portugal.

C’est dans le temps réglementaire que les joueurs de Walid Regragui se sont imposés sur un but de la tête du nouveau héros d’un pays, d’un continent, Youssef En-Nesyri (42e).

« J’avais dit aux gars avant le match qu’il fallait écrire l’histoire pour l’Afrique », a réagi le sélectionneur marocain Walid Regragui au coup de sifflet final.

Face à l’équipe de Cristiano Ronaldo, de nouveau remplaçant et inefficace après son entrée en jeu à 52e minute, les Lions de l’Atlas ont montré une maîtrise défensive et un cœur énorme, résistant à la pression de Portugais.

Ronaldo, lui, a quitté le Qatar tête basse. Qui se souciera qu’il soit devenu lors de ce match le co-détenteur du record mondial du nombre de sélections en équipe nationale avec 196 capes pour le Portugal, à égalité avec le Koweïtien Bader al-Mutawa?

En revanche, le Maroc a brisé le plafond de verre. Trois sélections africaines avaient échoué à franchir le cap des quarts de finale.

Mais, après avoir sorti la Belgique en poules, l’Espagne puis le Portugal, le gardien Yassine Bounou prévient: les Marocains comptent bien aller plus loin. « Les générations qui vont arriver sauront que le Maroc peut faire des miracles. »