Experte des réseaux sociaux, dotée d’une personnalité magnétique et d’un débit tranchant, l’artiste Megan Thee Stallion s’est imposée comme un membre éminent de l’avant-garde du rap.

À 26 ans, la reine des « hotties », surnom qu’elle donne à ses fans, a conquis les Grammy Awards en remportant trois victoires dimanche. Son talent singulier n’a jamais eu besoin du soutien de l’industrie pour exploser. Née Megan Pete, la rappeuse originaire de la métropole texane de Houston a un style rare, à la fois juteux et croustillant, verrouillé et spontané.

Son tube « Savage », succès retentissant sur l’application TikTok, lui a aussi valu les récompenses de la « meilleure performance rap » et de la « meilleure chanson rap », et le prestigieux titre de « révélation de l’année ». Dans ses chansons, elle débite ses paroles avec une précision militaire, créant un rythme pop, accompagné par ses twerks impressionnants.

Elle s’est révélée sur les réseaux sociaux, mais Megan Thee Stallion est une héritière du hip-hop à l’ancienne. Sa mère Holly Thomas, qui rappait sous le nom d’artiste Holly-Wood, l’a formée aux subtilités du genre. Elle a aussi été son manager, avant d’être emportée par un cancer en 2019.

« Merci, Maman, de m’avoir poussée et d’avoir su que j’arriverai là », a déclaré la rappeuse, en larmes, en recevant le prix de la « meilleure performance de rap » aux Grammy Awards, dimanche.

Savage et WAP

Après avoir séduit sur les réseaux sociaux grâce à ses capacités de freestyle, Megan sort en 2018 un EP (un mini-album) salué par la critique, nommé d’après son alter ego « Tina Snow ».

« Big Ole Freak », titre entraînant qui célèbre l’émancipation sexuelle, lui permet d’atteindre pour la première fois le célèbre classement « Hot 100 » du magazine Billboard.

Elle crée alors son personnage de « Hot Girl Meg », rappant avec enthousiasme sur le plaisir d’être une femme sexy et puissante.

En avril 2020, le remix de son titre « Savage », avec Beyoncé, devient son premier tube aux Etats-Unis, malgré sa sortie en pleine pandémie.

« WAP », hit de l’été en duo avec Cardi B, et dont le nom fait référence à une femme excitée sexuellement, a renforcé sa popularité.

Garder la tête haute

Megan a utilisé sa célébrité croissante pour dénoncer les violences faites aux femmes, et soutenir le mouvement contre le racisme Black Lives Matter.

L’été dernier, elle a été blessée par balles aux pieds, après avoir été visée par des coups de feu tirés, selon elle, par le rappeur Tory Lanez, après une dispute.

En octobre, Tory Lanez a finalement été inculpé, mais avant cela, la rappeuse a été l’objet de méfiance et de moqueries.

« Les femmes noires sont si peu protégées et nous retenons tant de choses pour protéger les sentiments des autres, sans tenir compte des nôtres », a-t-elle tweeté une semaine après la fusillade, mi-juillet.

« C’est peut-être drôle pour vous tous sur Internet et c’est peut-être juste un sujet de conversation, mais c’est ma vraie vie et je suis blessée et traumatisée. »

Avant l’élection présidentielle américaine de novembre 2020, elle a publié un puissant éditorial dans le New York Times, évoquant la violence et les accusations de mensonges qui l’ont visée.

« Trop d’hommes traitent les femmes comme des objets, ce qui leur permet de justifier les abus qu’ils nous infligent quand on décide d’exercer notre libre arbitre », écrivait-elle.

Révélation de l’année

Même si elle n’avait pas encore été récompensée aux Grammy Awards, Megan Thee Stallion a déjà remporté un grand nombre de trophées, comme lors des prestigieuses MTV Video Music Awards.

Le magazine Times l’a classée parmi les personnes les plus influentes en 2020, et elle est aujourd’hui la première rappeuse à se voir décerner le titre de « révélation de l’année » aux Grammy Awards, depuis Lauryn Hill en 1999.

« C’est ma première fois aux Grammy Awards, mais ce n’est pas la première fois que je vous divertis », a-t-elle lancé aux téléspectateurs dimanche, après une performance à couper le souffle.