Des heurts sporadiques ont opposé manifestants et forces de l’ordre guinéennes dans plusieurs quartiers de Conakry mardi, lors d’une journée de mobilisation contre un troisième mandat du président Alpha Condé, ont constaté des correspondants de l’AFP.

Par ailleurs, le pays, en pleine campagne pour la présidentielle du 18 octobre, a fermé ses frontières terrestres avec la Guinée-Bissau et le Sénégal.

Les autorités avaient interdit cette journée de mobilisation qui devait marquer, moins de trois semaines avant la présidentielle, l’entrée dans une nouvelle phase de la contestation menée depuis un an contre un troisième mandat de M. Condé.

Le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), qui mène cette contestation, a annoncé qu’un de ses dirigeants, Oumar Sylla, avait été interpellé et conduit dans un commissariat, une arrestation confirmée par le gouvernement.

Un correspondant de l’AFP a vu une douzaine de jeunes arrêtés et embarqués dans deux pick-ups des forces de sécurité.

Le gouvernement a affirmé dans un communiqué que « l’appel à la manifestation non autorisée du FNDC », n’avait dans l’ensemble « pas été suivi. Il a néanmoins fait état d’une dizaine d’interpellations « pour attroupement illégal, voies de fait, et dégradations de biens publics ».

A Bailobaya, en périphérie de la capitale, des jeunes ont érigé des barricades, renversé des poubelles, brûlé des pneus et déversé de l’huile de moteur sur l’axe principal reliant la banlieue au centre-ville.

Des scènes similaires se sont produites dans les banlieues de Matoto et Hamdallaye. Les forces de l’ordre ont utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants qui leur lançaient des pierres.

Le FNDC a fait état d’autres rassemblements, notamment dans l’Ouest du pays.

Ce collectif a fait descendre des milliers de Guinéens dans la rue depuis octobre 2019 pour faire barrage à M. Condé. La contestation a donné lieu à des heurts et a été plusieurs fois sévèrement réprimée. Des dizaines de civils ont été tués.

Le FNDC s’est insurgé contre « l’interdiction illégale de la manifestation pacifique » de mardi qui devait enclencher une nouvelle mobilisation massive.

Le gouvernement a justifié cette interdiction par la nécessité de donner la priorité aux rassemblements électoraux, considérant que « toute autre manifestation à objet politique ne saurait être autorisée sous peine de troubles sérieux à l’ordre public ».

Il a par ailleurs fermé les frontières terrestres avec la Guinée-Bissau et le Sénégal, pour des raisons de sécurité, a indiqué un responsable gouvernemental sous le couvert de l’anonymat.

Le ministre bissau-guinéen de l’Intérieur, Botche Candé, a dit avoir été informé par ses services « que la frontière avait été unilatéralement fermée par la Guinée (Conakry) depuis dimanche ».

Avant cette fermeture, des Guinéens résidant à Bissau et souhaitant participer à la présidentielle avaient fait état de difficultés pour s’inscrire au consulat et avaient commencé à tenter de rentrer dans leur pays pour pouvoir voter, selon des témoins.

La communauté peule, considérée comme favorable à Cellou Dalein Diallo, principal opposant à Alpha Condé, est largement représentée au sein de la diaspora, notamment dans les pays voisins de la Guinée.

Ancien opposant historique, Alpha Condé, 82 ans, premier président démocratiquement élu en 2010 après des décennies de régimes autoritaires, a été réélu en 2015.

Il a fait adopter, lors d’un référendum contesté en mars, une nouvelle Constitution qui maintient la limite de deux mandats présidentiels. Mais son camp argue que ce changement de loi fondamentale remet les compteurs à zéro.