Le président gabonais Ali Bongo Ondimba a assisté vendredi à une cérémonie commémorative à Libreville, sans faire de discours mais où il a été filmé par des médias internationaux pour la première fois depuis son AVC il y a dix mois, ont constaté des journalistes de l’AFP.
Il s’agit de sa première apparition publique, hors de son palais et filmée par d’autres organes que ceux de la communication de la présidence ou des médias d’Etat, au moment où une partie de l’opposition relance le débat sur sa capacité à exercer ses fonctions.
Les détracteurs du chef de l’Etat appellent d’ailleurs les Gabonais à venir massivement se faire leur avis sur la question samedi, lors du défilé militaire pour le 59e anniversaire de l’indépendance, auquel M. Bongo assiste chaque année.
Le président a également prononcé vendredi soir un discours de quelque 11 minutes, enregistré et diffusé à la télévision gabonaise, comme il l’avait déjà fait début juin.
Assis derrière le bureau présidentiel, M. Bongo a demandé « des efforts » à son gouvernement et à sa population avant d’annoncer des investissements dans les infrastructures, avec notamment le début, en septembre, d’une route de 780 km, la « transgabonaise », qui devra relier deux des plus grandes villes du pays, Libreville à l’ouest et Franceville à l’est.
Dans la matinée, M. Bongo, 60 ans, souriant, a échangé quelques mots avec des officiers des forces de sécurité, avant de déposer une gerbe au mausolée du premier président gabonais, Léon Mba.
Le chef de l’Etat se déplaçait avec une canne et son aide de camp l’a aidé à gravir quelques marches d’un escalier, ont constaté des journalistes de l’AFP assistant à la cérémonie, qui a duré une demi-heure, sur un parcours écourté par rapport aux années précédentes.
Le chef de l’Etat avait été hospitalisé d’urgence le 24 octobre 2018 à Ryad, où il devait assister à un forum économique.
La présidence avait dans un premier temps affirmé qu’il avait eu « un malaise » dû à une « fatigue sévère ». Ce n’est que le 9 décembre que Libreville a parlé officiellement d’un AVC.
M. Bongo a séjourné longuement au Maroc pour sa convalescence avant de rentrer définitivement au Gabon fin mars. Depuis l’AVC, ses apparitions publiques sont millimétrées, entre photos prises par les services de la présidence, publiées sur les réseaux sociaux, et discours diffusés en différé.
Dix personnalités de l’opposition ont déposé fin mars un recours devant la justice pour demander un examen médical du président pour déterminer s’il est en capacité de diriger le pays.
Une audience est prévue devant la cour d’Appel de Libreville le 26 août mais, en attendant, le défilé militaire de samedi pour la fête nationale sera déjà « l’occasion pour le citoyen lambda de se faire sa propre opinion », résume Jean-Gaspard Ntoutoume Ayi, un des dix signataires de « Appel à Agir », le collectif qui a déposé la demande d’expertise médicale.
Pour Florence Bernault, historienne à Sciences Po spécialiste du Gabon, ces rumeurs doivent leur survie à « la peur du faux » des Gabonais, qui n’ont toujours pas digéré la victoire – contestée par l’opposition – d’Ali Bongo aux élections de 2016