Le Rwanda a fermé sa frontière avec la RDC jeudi, au lendemain de la mort d’une deuxième victime de l’épidémie d’Ebola à Goma et la détection d’un troisième cas dans ce grand carrefour commercial frontalier, des développements accroissant les risques de propagation de la maladie dans la région.
« Sur décision unilatérale des autorités rwandaises, les citoyens rwandais ne peuvent pas sortir pour Goma », a rapporté un communiqué de la présidence de la République démocratique du Congo.
Cette mesure a été confirmée du côté de Kigali: la frontière « est fermée », a déclaré un responsable gouvernemental rwandais, sous couvert de l’anonymat, et sans fournir plus de précisions.
Les Congolais peuvent quitter la ville rwandaise de Gisenyi, frontalière de Goma, mais pas y entrer, a ajouté Kinshasa qui regrette la fermeture de la frontière à cause de la fièvre hémorragique qui a déjà fait plus de 1.800 morts en RDC en tout juste un an.
« Cette décision préjudicie plusieurs Congolais et expatriés qui vivent à Gisenyi mais travaillent à Goma » et va à l’encontre de la recommandation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur la libre circulation des personnes dans la région, ajoute le communiqué de la présidence congolaise.
Les Congolais sont, eux, autorisés de traverser la frontière. En revanche, il leur est interdit de retourner au Rwanda, même ceux qui vivent à Gisenyi.
Goma forme un hub régional, disposant d’un aéroport reliant les capitales de Kinshasa en RDC, Entebbe-Kampala en Ouganda et Addis Abeba en Ehtiopie.
Des bateaux en partent aussi vers la province congolaise du Sud-Kivu. En juin, deux cas d’Ebola en provenance de la RDC avaient détectés sur le territoire ougandais.
– ‘La pompe est amorcée’ –
Le deuxième malade d’Ebola décédé mercredi à Goma était un orpailleur qui travaillait à Mungwalu dans la province voisine de l’Ituri, dans l’est de la RDC, mais vivait avec son épouse et leurs dix enfants dans le quartier pauvre de Kiziba dans le nord de Goma.
Il a présenté des signes de la fièvre hémorragique le 22 juillet. Il a reçu des soins ambulatoires dans un centre communautaire mais ne s’était rendu à l’hôpital de référence de Goma que le 30 juillet où il a été directement transféré à un centre spécialisé.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, un troisième cas, sa fille âgée d’une année, a été testée positive.
Aussitôt, l’équipe de lutte contre Ebola a entamé la vaccination de tous les membres de cette famille, leurs contacts et les contacts de leurs contacts habitant ce quartier insalubre et densément peuplé.
La zone manque d’un système moderne de distribution d’eau potable et c’est sur les bords du lac Kivu ou près camions citernes que la population, en colonnes de femmes et des enfants bidons sur la tête, s’agglutinent chaque matin pour s’approvisionner.
Dans la province voisine du Sud-Kivu, une femme, proche de l’orpailleur décédé mercredi à Goma, avait été mise en quarantaine avec quatorze autres personnes de sa famille.
Le gouverneur du Sud-Kivu Théo Ngwabidje Kasi a déclaré à la presse que les tests effectués sur ces 15 cas suspects s’étaient avérés négatifs.
Mais les risques de propagation demeurent. « Maintenant la pompe est amorcée », s’est inquiété un responsable d’une organisation humanitaire.
Un premier cas avait détecté le 17 juillet à Goma en provenance de Butembo, l’un des principaux foyers de la maladie. Le lendemain de son décès, l’OMS avait élevé la dixième épidémie de fièvre hémorragique Ebola en RDC au rang d’urgence sanitaire mondiale.
L’Union africaine avait de son côté mis en garde contre des restrictions de voyages en provenance de la RDC malgré le risque de propagation, des malades pouvant échapper au contrôle aux frontières en traversant clandestinement ailleurs.
L’épidémie frappe deux provinces de l’est de la RDC (nord-Kivu et Ituri) et dure depuis août 2018. Relativement circonscrite depuis, sa propagation à de grands centres urbains densément peuplés et au-delà des frontières de la RDC lui donnerait une nouvelle dimension,
Selon le bulletin quotidien des autorités sanitaires congolaises daté de mercredi, « le cumul des cas est de 2.701, dont 2.607 confirmés et 94 probables. Au total, il y a eu 1.813 décès (1.719 confirmés et 94 probables) et 776 personnes guéries ».